Comprendre les troubles anxieux et de l’humeur

En 2021, environ 6 % de la population québécoise de 12 ans et plus avait reçu un diagnostic d’un trouble de l’humeur comme la dépression, majoritairement des femmes. 

Au CIUSSS de l’Estrie - CHUS, plusieurs chercheuses et chercheurs tentent de comprendre les troubles anxieux et de l’humeur afin d’améliorer la qualité de vie des enfants et des adultes qui doivent vivre avec ceux-ci.

Découvrez les innovations des équipes de recherche de l’Institut universitaire de première ligne en santé et services sociaux (IUPLSSS) et du Centre de recherche du CHUS (CRCHUS) en matière de santé mentale!
 

Traiter efficacement les troubles anxieux

L’anxiété est une émotion que l’on ressent tous à certains moments, par exemple lorsqu’on s’inquiète au sujet de notre santé ou qu’on doit gérer des problèmes financiers. C’est une expérience humaine qui peut nous aider à nous motiver, nous adapter et nous protéger en nous éloignant de certains dangers. 

Or, pour certaines personnes, l’anxiété est vécue de manière intense et démesurée, au point tel où cette souffrance trouble le fonctionnement et la qualité de vie. C’est à ce moment qu’on parle de troubles anxieux. 

Il existe plusieurs types de troubles anxieux. Voici quelques-uns des plus courants :
  •    le trouble d’anxiété sociale –
Jérémie a abandonné ses études, car la pression du jugement par ses professeurs et ses pairs était trop intense.  
  •    le trouble d’anxiété généralisée –
Lise s’inquiète plusieurs heures par jour au sujet du bien-être de ses enfants. Liam craint vivement d’échouer ses examens, même si ses résultats sont très bons à l’école. 
  •    le trouble panique – Marc se retrouve souvent à l’urgence pour ses symptômes d’attaque de panique, tels que les palpitations, les étourdissements, le sentiment d’irréalité et la peur de mourir. 

Une équipe de recherche dirigée par Pasquale Roberge, chercheuse au CRCHUS, travaille sur la thérapie cognitive-comportementale (TCC), une approche qui permet, en groupe, de développer de nouvelles habiletés pour gérer l’anxiété, tels que modifier notre façon de penser ou d’agir face à des situations craintes. Dans le cadre de ses recherches, elle souhaite notamment déterminer les facteurs qui permettraient d’améliorer l’accès à la TCC.

Une thérapie de groupe qui fonctionne!

La chercheuse qui est aussi professeure à l’Université de Sherbrooke (UdeS) et ses collaborateurs ont réalisé une vaste étude clinique dans trois régions au Québec, dont l’Estrie, auprès de personnes souffrant de troubles anxieux. Le projet a démontré l’efficacité d’un traitement de groupe d’approche cognitive-comportementale pour l’anxiété. À la suite de ces résultats concluants, l’équipe de recherche a développé une formation en ligne, en collaboration avec le Centre d’expertise en santé de Sherbrooke, pour soutenir le développement des capacités des psychologues et psychothérapeutes face à cette intervention.

L’équipe accompagne aussi les équipes cliniques qui souhaitent implanter ces groupes de thérapie dans leur pratique. 

La plateforme d’autosoins ēquilia

Par ailleurs, dans le cadre d’un autre projet de recherche, Pasquale Roberge et ses collaborateurs du CIUSSS de l’Estrie – CHUS, de l’UdeS et de l’Hôpital Montfort en Ontario ont implanté la plateforme d’autosoins ēquilia. Ēquilia.ca comprend quatre modules d’autosoins au sujet des troubles anxieux et dépressifs, ainsi que sur le bien-être. La plateforme est une adaptation de This Way Up en Australie, dont l’efficacité est bien établie. Il s’agit d’outils efficients s’adressant aux participants au programme de recherche afin qu’ils apprennent à gérer eux-mêmes leurs symptômes d’anxiété et de dépression à partir de stratégies cognitives et comportementales. L’équipe de Pasquale Roberge mènent une vaste étude pour documenter l’acceptabilité, l’efficacité et l’implantation de ce genre d’approche au Québec, en complément aux études réalisées en Australie.

D’autres modules s’adressant aux participants à la recherche seront lancés au cours des prochains mois.

Favoriser une bonne santé mentale chez les enfants… aujourd’hui et tout au long de leur vie!

Avant la pandémie de COVID-19, au Québec, un tiers des jeunes éprouvait des problèmes de santé mentale (anxiété, dépression, inattention/hyperactivité, opposition, etc.). Depuis, le nombre d’entre eux se rendant à l’urgence et à qui on prescrit des médicaments pour des problèmes de santé mentale comme l’anxiété a augmenté. Les mesures de distanciation sociale, la fermeture des écoles et l’enseignement à distance, notamment, ont avivé leurs difficultés d’adaptation scolaire et psychosociale. 

L’équipe de Catherine Malboeuf-Hurtubise, chercheuse à l’IUPLSSS et au CRCHUS, développe des interventions basées sur les arts et la philosophie pour remédier aux effets néfastes de la pandémie sur la santé mentale des jeunes et prévenir l’émergence de nouvelles difficultés. Ses travaux, réalisés dans les classes primaire du Québec qui participent au projet de recherche, ont pour objectif de mettre sur pied des interventions et activités faciles à implanter dans les écoles tant par les psychologues scolaires et autres intervenants en relation d’aide que par le personnel enseignant. Les ateliers s’adressent à tous les enfants, peu importe leur niveau initial d’anxiété. Agir en prévention permet de fournir des outils qui pourront être utiles dans le futur.

Comment ça fonctionne?

L’équipe anime, dans les écoles, des rencontres basées sur les arts et la philosophie à raison d’une fois par semaine. Les jeunes sont appelés à créer sur une thématique donnée (ex. : l’amour, l’identité), puis discutent en groupe du thème à partir de leurs créations. Différentes pratiques artistiques sont utilisées durant les ateliers : sculpture, blocs de construction, peinture, danse, etc. afin de permettre à tous d’y trouver leur compte. Les discussions philosophiques sont centrées autour des mêmes thèmes que les créations (ex. : c’est quoi, l’amour?, pourquoi demeurons-nous la même personne même si nous changeons tout le temps?) et complètent l’atelier. Parfois, l’équipe réalise des entrevues avec les enfants, individuellement, ainsi que leur enseignante, afin d’avoir leur rétroaction quant à l’intervention. 

Des effets bénéfiques chez les jeunes

Les résultats de recherche indiquent que les ateliers ont un impact positif sur le bien-être des enfants. Les jeunes, comme le personnel enseignant, ont indiqué que les ateliers favorisent l’identification et l’expression des émotions ainsi que le développement de leur autodétermination, c’est-à-dire leur capacité d’agir de manière cohérente avec ce qui est important pour eux et selon leurs valeurs. Les activités favorisent le partage d’émotions et les enfants rapportent une grande fierté personnelle d’avoir pris part au processus créatif. Le corps enseignant dit mieux connaitre ses étudiants, ce qui a un impact positif sur le climat de la classe. 

Les résultats ont aussi montré que la pratique de la philosophie est efficace pour améliorer le bien-être et la santé mentale des enfants, notamment car elle favorise l’autodétermination et qu’elle réduit l’anxiété.

Depuis deux ans, la chercheuse Malboeuf-Hurtubise, qui est aussi professeure agrégée à l’Université Bishop’s et psychologue, combine les approches pour évaluer si la pratique conjointe de l’art et de la philosophie a un effet plus grand sur la santé mentale des enfants que chaque pratique prise séparément.

Mieux outiller les professionnels de la santé

Les personnes vivant avec des troubles mentaux ont des besoins complexes et variés. Les spécialistes en santé mentale ne peuvent à eux seuls répondre à la demande et aux besoins de ces personnes. L’ensemble des professionnels de la santé qui sont en contact avec une personne présentant des signes cliniques d’anxiété ou de dépression ou ayant reçu un diagnostic de trouble mental devraient pouvoir leur offrir des interventions de base, et ce, en collaboration avec les spécialistes. Par contre, ce personnel, non spécialisé en santé mentale, peut se sentir souvent peu outillé à intervenir et peu soutenu pour faire face à la demande grandissante et répondre aux besoins de la clientèle. 
C’est pourquoi Ariane Girard, chercheuse à l’IUPLSSS et au CRCHUS, a mis sur pied un projet de recherche participatif visant à découvrir les conditions qui aideraient le personnel infirmier à mieux intervenir auprès de ces personnes. Elle souhaite aussi connaître la meilleure façon d’intégrer ces conditions à l’environnement de travail des professionnels afin qu’ils se sentent à l’aise et bien soutenus pour intervenir auprès de cette clientèle.

Des actions concrètes pour aider le personnel soignant

La chercheuse, qui est également professeure à l’UdeS, a développé et évalué la première version d’un programme de formation à l’intention du personnel infirmier œuvrant en groupe de médecine familiale (GMF). Le programme vise à améliorer l’adoption des bonnes pratiques d’évaluation clinique auprès des personnes avec des problématiques de santé mentale. Celui-ci est structuré pour permettre aux infirmières de réfléchir à leur pratique, de s’approprier les bonnes pratiques d’évaluation et de se mettre en action en discutant d’un cas clinique jugé difficile avec un expert en santé mentale et des collègues infirmiers. Elles ont également proposé des solutions adaptées à leur contexte de travail pour maintenir l’adoption de ces bonnes pratiques.

Un plus pour la société!

Ariane Girard et son équipe souhaitent renforcer le pouvoir d’agir des professionnels de la santé pour qu’ils puissent s’améliorer en continu afin d’offrir les meilleurs soins possibles. Ils souhaitent, entre autres, générer des connaissances scientifiques pour aider les acteurs clés (ex. : gestionnaires et directions d’établissements) à implanter des mécanismes qui favorisent l’autonomie des professionnels et leur engagement dans l’amélioration continue de leur pratique. 

Il est démontré que les professionnels qui reçoivent un bon soutien et qui s’engagent dans l’amélioration continue de leur pratique sont plus satisfaits au travail et enclin à rester dans le même travail. Nous avons tout intérêt comme société à investir dans l’amélioration continue des pratiques professionnelles pour bonifier la qualité des soins offerts aux personnes présentant des problématiques de santé mentale!

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